face à face. elle a joué à l'aveugle, a fermé les yeux sur votre relation qui tournait à l'indécence. t'étais devenu la représentation de ses démons, toi qui la poussait inconsciemment à plonger dans les abysses d'un cauchemar qui s'était refermé sur elle. cela depuis le jour où elle avait posé les yeux sur ton visage angélique éclairé par deux billes céruléennes, corps frêle qui trouve naufrage sur la plage de sable fin où s'est échouée sa raison. t'avais besoin d'elle. elle le sentait. elle le voulait. vint le refus douloureux de voir qu'un jour tu volerais de tes propres ailes. alors elle t'enchaine à elle, douce succube qui fait glisser ses doigts le long de ton visage, qui te susurre des promesses idylliques à l'oreille, qui effleure tes lèvres des siennes. l'amour obsessionnel de l'enfant qui passe de pur à malsain, la haine des autres qui se pâment devant, séductrices avides de l'homme qui se forme. et toi, tu l'aimes. tu crois l'aimer. dans la confusion de la signification de l'amour, la simplicité d'aimer sa façon de lisser sa crinière dorée, de te regarder, de se mouvoir pour arriver à toi. tu l'aimes encore lorsque la lame déchire sa chair, lorsque ses yeux vitreux te regardent encore avec amour. elle comprend que c'est la fin. peut-être l'avait-elle espéré. ou regretté. mais tu lis dans ses yeux qu'elle ne cessera jamais de te vouer une adoration morbide, alors même que c'est son sang qui glisse le long de ta main assassine. tu la regarde glisser sur le sol dans le chuchotement de la souffrance qui s'expire. elle étire lentement son bras vers toi qui ne s'élève que quelques secondes, l'épuisement qui est la preuve de la vie qui persiste encore, qui s'éteindra bientôt.. « ce qui est à l'océan retourne à l'océan. il te reprendra, amour. il compte les grains qui s'égrènent dans le sablier pour pouvoir enfin te ramener à lui. » les paroles qui se perdent dans ta défiance. elle n'a pas compris la douce folie qui s'est glissée dans ton âme. les jeux que tu enchaînes avec les gamins du village, ceux que tu as toujours gagnés. elle n'en comprends pas la perversité, la mort que tu as déjà semée, le corps que t'as jeté du haut de la falaise. huit ans, peut-être six. c'était l'âge de l'enfant qui repose désormais dans les bras de la mer, celui que pleure une famille innocente. les défis, tu les as tous relevés. ils en ont eu peur, ils ont fini par fuir. par alerter les autres. ils l'ont cru, bien sûr. t'avais toujours été étrange pour eux, le lutin à la malice démoniaque habitant au bord de la mer avec une sorcière maléfique. ils ne savent pas, ne comprennent pas qui vous êtes tous les deux, ce qui vous motive. ta main qui caresse son visage, ton front qui s'appose contre le sien avec une douceur contrastante.  « je devais le faire, tu sais. pour que je puisse enfin commencer le jeu. » tu t'étais lassé d'eux, de ces imbéciles qui ne te distraient plus. l'ennui te ronge, ton talent qui mérite plus que les sots qui t'entoure. seule elle était à la hauteur. mais maintenant, elle est un obstacle, elle te gêne. les chaînes qu'elle retient autour de tes chevilles doivent être brisées pour que tu puisses enfin commencer à vivre comme tu l'entends.  « le jeu ? qui peut être assez fou pour cela ? qui te défie ?» elle sait que tu vis de cela, mais n'a pas conscience que tu es né pour n'arriver qu'à satisfaire ceux qui t'entourent sans parvenir à le faire pour toi-même. l'éternelle chasse de l'amusement, la cavale contre l'ennui. un cycle maudit dont tu es la scandaleuse victime. tu te penches sur elle, tu l'étonnes de l'improbable réponse qui s'échappe de tes lippes. « le temps. la vie. la mort. » tes plus grands ennemis, ceux qui ne peuvent autant que toi se refuser la victoire. tu es né pour gagner, et c'est ce jeu là que tu désire emporter. folie qui est celle de vouloir être au dessus de ce qui n'a pas de forme. l'ambition qui te dévore avec amicalité, et toi qui goûte au supplice exquis de voir que tu es ta propre malédiction, ta propre perte. « la mort ne me séparera pas de moi, rien n'en a le pouvoir.  » ton sourire triste comme réponse. elle le sait, tes yeux qui s'ouvrent enfin sur une vérité douloureuse. rien ne t'as jamais suffi. tu es l'éternel insatisfait qui a détruit sa vie alors même qu'elle l'a rendue d'une beauté effroyable. tu crois la faire disparaître alors que tu la rends immortelle. tes mains plongent dans ses entrailles, son cœur vibrant que tu sers contre le tien avec amour. elle ne verra pas les larmes que tu ne retiens pas, qui tracent leur sillon le long de ta peau humide, qui se perdent dans l'écarlate qui s'écoule d'elle. tu l'aimes et tu la tue, tu l'aimes et tu la détruis. alors l'aimes-tu vraiment ? tu ne sais pas, mais tu l'embrasses, tu portes son cadavre à l'océan. c'est quand elle disparaît emportée par la douceur de l'onde qui dort, sous l'accalmie naissante, que tu sers l'écaille brillante subtilisée à ta jolie comme tu sers les souvenirs qui se noient avec elle.
est-ce une victoire ou un échec ?

burn it down, je l'ai construis pour le briser à nouveau. j'ai construis cela pour y mettre le feu. la hâte de tout réduire en cendre, les couleurs qui se mélangent alors que les flammes s’élèvent dans le ciel.